lancement des dbats, en prlude au futur plan


"Il faut qu'on arrête de penser que les problèmes du climat, c'est le problème de la COP et du bout du monde. C'est notre problème à tous. Tout de suite et pour les années qui viennent", a lancé ce 23 janvier le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, devant un parterre d'experts, élus, responsables d'entreprises et représentants de la société civile réunis au Museum National d'histoire naturelle à Paris pour une matinée d'échanges sur la question de l'adaptation au changement climatique.
Emmanuel Macron avait lors de sa récente conférence de presse appelé à se saisir du problème. "Quels que soient les efforts qu'on fait... nous aurons à vivre les conséquences du dérèglement climatique, il est déjà là. Et donc on doit s'adapter", avait déclaré le président de la République. Christophe Béchu avait déjà appelé l'an dernier à sortir du "déni" et à préparer la France à un réchauffement de 4°C par rapport à l'ère préindustrielle sur le territoire métropolitain, soit un scénario moins optimiste que ceux retenus jusqu'alors. Le pays subit en effet un réchauffement plus marqué que la moyenne mondiale, notamment parce que les continents se réchauffent plus que les océans. Or le monde n'a pas fini de se réchauffer en raison de la poursuite des émissions de gaz à effet de serre.

Se préparer à un réchauffement de 4°C à l'horizon 2100

"Je pense que 1,5 degré c'est mort et enterré", estime ainsi Jean-Marc Jancovici, influent patron du Shift project, en référence à la limite la plus ambitieuse de l'accord de Paris de 2015. "Parce que le système socio-technique installé - les usines, les villes, les moyens de transport, etc., on ne va pas les changer à la bonne vitesse", prédit-il. Mais le sénateur écologiste Ronan Dantec préfère retenir que les dynamiques politiques mondiales "sont en train de stabiliser le climat", qui ne devrait donc pas aller au-delà de +4°C en France... "Donc c'est quand même plutôt une nouvelle positive, même si c'est trop", juge-t-il.

La Banque des Territoires s'engage pour l'adaptation au changement climatique du littoral

Ce réchauffement de 4°C - contre environ 1,7°C aujourd'hui - servira donc de base pour la préparation du troisième Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC), qui devrait se traduire selon le ministère de la Transition écologique par une cinquantaine de mesures articulées autour de quatre axes– "protéger les Français", "adapter les territoires et assurer la continuité des infrastructures et des services essentiels", "assurer la résilience de l'économie", "préserver les milieux naturels et culturels". Ce plan doit faire l'objet d'une réunion gouvernementale autour du premier ministre Gabriel Attal "vers la fin du mois de février" puis sera mis en consultation un mois plus tard pour être ensuite publié "au moment du début de l'été" (lire notre article). Concrètement, il pourrait par exemple entraîner une refonte du code du Travail (pour adapter les horaires aux pics de chaleur), encourager les îlots de fraîcheur dans les villes ou encore prévoir une refonte des normes pour la construction ou les infrastructures.

Bouleversements en cascade

Une tâche vertigineuse tant les répercussions du réchauffement climatique sont nombreuses, sur l'agriculture, la santé, les migrations, les milieux naturels, le tourisme ou les infrastructures... "Pendant l'été, il faut s'attendre à ce que nos barrages reçoivent moins d'eau qui viennent des glaciers, que notre agriculture reçoive moins d'eau", rappelle la glaciologue Heidi Sevestre. "Il faut se préparer à ce qu'un port comme Le Havre ou l'aéroport de Nice se retrouvent les pieds dans l'eau. Et ça se prépare tout de suite...", poursuit-elle.
Dans les projections du ministère à l'horizon 2100, Lille aura le climat de Bilbao, Paris celui de Montpellier, Brest celui de Vigo, Lyon celui de Rome, Toulouse celui de Valence et Marseille celui de Séville. L'enneigement serait limité à 10 jours dans les Pyrénées et à 20-40 jours dans les Alpes (avec des variations géographiques puisqu'on prévoit moins de 5 jours de neige par an dans le sud du massif alpin, par exemple). Les glaciers alpins pourraient avoir disparu en totalité à la fin du siècle. Les zones urbaines de la moitié nord de la France pourraient connaître 40 à 50 nuits tropicales (température supérieure à 20 °C) par an, soit autant que le maximum du littoral méditerranéen aujourd’hui, et les zones les plus exposées du pourtour méditerranéen plus de 90 nuits à plus de 20°C par an. Il faut aussi s'attendre à des vagues de chaleur d’1 ou 2 mois l'été sur l’arc méditerranéen, le couloir rhodanien et la vallée de la Garonne, selon les projections du ministère. Il y a aussi à la fois un fort risque d'aggravation des inondations et de diminution des ressources en eau. 
A terme, cela signifie par exemple une culture de la vigne qui devient difficile dans le sud, un bouleversement de l'économie touristique en montagne et même de premiers réfugiés climatiques de Miquelon (Saint-Pierre-et-Miquelon), menacé par la montée des eaux. Christophe Béchu a appelé mardi à "surmonter la sidération quand on mesure ce que veut dire +4°C". "On va devoir changer nos villes, nos paysages, nos régions", a déjà prédit Emmanuel Macron.

Deuxième préoccupation des Français après le pouvoir d'achat

Selon un sondage Harris Interactive et Toluna*  présenté lors de la rencontre de ce 23 janvier, les Français expriment en tout cas pleinement leurs inquiétudes face au changement climatique. Celui-ci représente leur deuxième préoccupation (43%), après le pouvoir d’achat (56%), mais devant l’insécurité et le système de santé. Dans le détail, il apparaît davantage comme une préoccupation majeure chez les plus de 35 ans, les personnes ayant les revenus les plus importants et les plus diplômés. De manière plus générale, une large majorité de la population déclare que le changement climatique l’inquiète et près de 4 Français sur 10 témoignent même d’une appréhension importante sur le sujet. Si plus de la moitié des Français (61%) déclarent être bien informés sur le changement climatique et ses effets, ce niveau d’information reste pour beaucoup d’entre eux à améliorer. 7 Français sur 10 déclarent en tout cas avoir personnellement constaté des effets du changement climatique au cours des dernières années autour de chez eux. Parmi ces effets, ils citent surtout "une hausse de la température extérieure sur l’ensemble de l’année", "une hausse du nombre et de la durée des vagues de chaleur et canicules", "une hausse du nombre et de la durée des épisodes de sécheresse" et "une baisse de la fréquence des chutes de neige et de la durée d’enneigement".

9 Français sur 10 estiment qu’il faudra changer les modes de vie pour faire face aux effets du changement climatique, et près de la moitié l’expriment de manière certaine. La quasi-totalité de la population (93%) estime qu’il est important de mettre en place des actions pour s’adapter au changement climatique.  Parmi ces actions, ils citent par ordre de priorité le développement de la végétation en ville, le renforcement des infrastructures prioritaires (transports, énergie, hôpitaux, écoles) et l’interdiction de l’accès aux forêts en période de risques d’incendies. Seuls quatre Français sur dix se disent en outre bien informés sur les mesures d’adaptation actuellement mises en place mais six sur dix estiment qu’il n’y en a pas assez.

Ceux qui doivent agir et ceux en qui on a le plus confiance 

Le gouvernement est perçu comme le premier acteur devant agir en priorité pour adapter le pays aux effets du réchauffement (53%), avant les citoyens (41%), l’Union européenne (31%), les entreprises (31%), les collectivités locales (20%), les experts (15%) et les associations (5%). Mais 62% de la population ne lui fait pas confiance pour trouver des solutions, pas plus qu'aux entreprises (60%) ou à l'Union européenne (55%). Ce sont les scientifiques et les experts qui bénéficient du plus haut niveau de confiance pour trouver des solutions afin d’adapter la France aux effets du changement climatique (79%), devant les collectivités locales (67%) et les associations / ONG (66%).

* Sondage réalisé en ligne entre le 5 et le 9 janvier 2024 auprès de 2.037 personnes représentatives de la population française
 

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