Selon l'article premier du décret du 30 janvier 2009 créant le Conseil de la création artistique (voir notre article ci-contre du 3 février 2009), "le conseil examine en priorité les mesures de nature à permettre le développement de nouvelles sources de financement de la création artistique" et, à cet effet, "étudie les modalités de gestion et d'évaluation des aides à la création artistique et formule toute proposition d'amélioration". Son délégué général, le producteur et patron des cinémas MK2 Marin Karmitz, a finalement choisi de s'éloigner de la lettre du décret en laissant de côté - pour l'instant ? - cet aspect de la mission du conseil, promis à l'évidence à de fortes tensions avec les acteurs culturels.
Lors de la conférence de presse organisée le 10 septembre au musée du Quai Branly, en présence de Frédéric Mitterrand, le délégué général s'en est en effet tenu à l'annonce d'un certain nombre de projets innovants - et consensuels - d'action culturelle. On observera au passage que la mission sur le financement et l'évaluation a totalement disparu de la présentation du Conseil figurant dans le dossier de presse remis à l'occasion de la conférence. Selon les termes du communiqué de l'Elysée du 9 septembre, les projets présentés "ont été approuvés" par Nicolas Sarkozy, qui avait reçu la veille les membres du Conseil de la création artistique dont il est le président en titre. Leur principe repose sur ce que Marin Karmitz qualifie de "maître mot d'une politique culturelle" : la transversalité. En pratique, il s'agit avant tout de mettre en réseau les acteurs culturels autour de projets pluri-institutionnels et pluridisciplinaires. Le plus spectaculaire et le plus ambitieux de ces premiers projets - il s'agit de rien moins que de refaire de Paris "la capitale mondiale de l'art" - est celui de la "colline des arts". Inspiré de l'exemple du quartier des musées de Vienne (Autriche), il s'agirait de mettre en réseau tous les établissements culturels autour de la colline de Chaillot et de la tour Eiffel - Quai Branly, musée d'Art moderne, cité de l'Architecture, musées Guimet et Galliera, palais de Tokyo et théâtre de Chaillot - pour proposer une "offre globale", avec un pass et des transports organisés. Autre grand chantier de développement culturel proposé par le Conseil de la création artistique : celui de "Paris-périphérie", qui mettrait en réseau les établissements culturels au nord de la capitale, de La Villette (Paris) à Aubervilliers, en associant la communauté d'agglomération de Plaine Commune (Seine-Saint-Denis). De même, un autre projet prévoit la création d'une "école de cinéma nomade", installée sur une péniche et dirigée par Abdellatif Kéchiche, le réalisateur de "La Graine et le mulet" (qui se passe précisément sur une péniche...). Tout en proposant de "rompre avec l'isolement des territoires", le Conseil a manifestement choisi de centrer ses projets structurants sur Paris et sa petite couronne, ignorant la province.
D'autres projets plus modestes débordent toutefois le seul cadre francilien. C'est le cas de la mise en place, dès 2010, d'une quarantaine de petits ensembles musicaux. S'inspirant de l'exemple du Venezuela, ils auront pour mission de faciliter l'accès des jeunes en difficulté à la musique classique. C'est aussi le cas du projet de création d'une manifestation artistique nationale. Préparée avec les services du haut-commissaire à la Jeunesse, celle-ci permettrait à de jeunes créateurs - et pas seulement à de jeunes artistes - "de s'approprier, à travers toute la France, des lieux chargés d'histoire : usines, gares, théâtres, châteaux, monuments, parcs... et de les 'détourner' par la force de leur invention". Les régions auront également droit à une exposition itinérante, organisée par le centre Pompidou, et permettant d'"offrir à tous, sur l'ensemble du territoire, la possibilité de mieux comprendre l'art contemporain et la démarche des créateurs". Cette exposition s'appuiera sur l'"espace d'exposition nomade d'environ 1.000 m2" que le Centre Pompidou doit ouvrir en septembre 2010. D'autres projets sont également évoqués, comme des retransmissions d'opéras dans des scènes publiques, le développement d'expositions virtuelles ou un ciné-club en ligne pour les étudiants sous la forme d'une plateforme VOD (vidéo à la demande).
Jean-Noël Escudié / PCA
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