Le Grand Narbonne recycle ses eaux uses pour irriguer des vignes (11)

Le territoire de la Communauté d’agglomération du Grand Narbonne s’illustre par son caractère pionnier, en France, en matière de réutilisation des eaux usées traitées. Depuis juin 2022, plusieurs viticulteurs du massif de la Clape bénéficient ainsi d’eau issue de la station de Narbonne-Plage pour irriguer leurs vignes au moyen d’un système de goutte-à-goutte.

Cette initiative intitulée IrriAlt’eau 2.0 est portée par le Grand Narbonne et l’association syndicale autorisée (ASA) de Gruissan, en partenariat avec la cave coopérative de Gruissan et l’Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE). Elle ne concerne qu’une faible partie des espaces viticoles du territoire, 81 hectares sur les 19 600 hectares cultivés en vigne au total, mais entend répondre aux problèmes posés par les sécheresses récurrentes. « Ce phénomène n’est pas récent chez nous mais les vignes souffrent de plus en plus, parfois jusqu’à la mort des ceps. Or, le secteur viticole représente une activité économique majeure dans le Grand Narbonne, explique le vice-président du Grand Narbonne en charge notamment de l’eau potable et de l’assainissement, Michel Jammes, également maire de Sigean. La question s’est alors posée pour soutenir ce secteur, mais sans puiser dans les réserves d’eau potable. »

Tests scientifiques

Avant son extension effective dans les espaces viticoles, l’application d’eau usée traitée a été testée scientifiquement. Ainsi, l’antenne locale de l’Inrae a évalué, de 2013 à 2018, à l’aide d’un prototype de traitement de l’eau élaboré par Veolia, si l’apport d’eau usée traitée avait ou non un impact sur la qualité du raisin et du vin. Aucun effet significatif n’ayant été perçu, le projet pouvait être poursuivi. 

L’installation d’un dispositif de traitement complémentaire articulé à la station d’épuration de Narbonne-Place est alors engagée. Terminé en septembre 2021, il comprend un équipement de surveillance de la qualité de l’eau prélevée, une pompe, une bâche de stockage des eaux brutes (400 m³), un système de filtration et de désinfection de l’eau (UV et chlore), puis une bâche de stockage des eaux traitées, où vient se connecter le circuit d’irrigation. 

Un circuit sous contraintes

« À partir de là, un autre enjeu se pose pour déterminer comment distribuer l’eau dans des vignes à proximité de la station d’épuration, une distribution lointaine étant exclue financièrement. Il faut que les viticulteurs décident où placer le curseur de l’extension de la zone irriguée, étant donné le coût de distribution », explicite Michel Jammes. Les producteurs se sont organisés en Association syndicale autorisée (ASA) de Gruissan afin de construire une station de surpression et déployer un réseau d’irrigation collectif de 7,6 kilomètres (102 parcelles). « La station d’épuration de Narbonne-Plage bénéficie d’un volume d’eau suffisant et constant en période estivale, grâce à l’arrivée des vacanciers sur le littoral », précise le service communication du Grand Narbonne. L’eau est proposée au tarif de 38 centimes le mètre-cube aux irrigants.

Stations littorales

Cette initiative fait suite à une première expérimentation initiée par les Vignobles Cap-Leucate associés à l’entreprise BRL Exploitation, qui avait abouti en 2019 à l’irrigation de 15 hectares de vignes à partir de la station d’épuration de Roquefort-des-Corbières. Elle devrait être complétée à moyen terme par un dispositif similaire qui alimenterait entre 20 et 50 hectares de vignes près de Leucate. « Les projets concernant des stations d’épuration de bord de mer ont bien plus de chances d’aboutir et de dépasser la réticence des services de l’État, car les stations qui relarguent l’eau dans une rivière contribuent à soutenir l’étiage en été. Détourner de l’eau destinée à la mer n’a en revanche aucune incidence environnementale », précise Michel Jammes. 

Enfin, un équipement de traitement, une « Reut Box », imaginée par Veolia, a été posé à la station d’épuration de Narbonne. Elle fournit à la commune près de 90 % de ses besoins en eau pour des tâches techniques et d’entretien du site.

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