De quelques centaines d’éoliennes représentant une puissance totale d’environ 50 MW en 2000, le parc éolien français est passé, en 15 ans de politique publique de soutien à cette technologie, à 11.800 MW fin 2016, soit près de 3,9% de la production électrique française, se hissant ainsi au quatrième rang européen, indique l’Ademe dans une étude exhaustive sur la filière publiée le 19 septembre. En 2015, le chiffre d’affaires total de cette filière, comptant près de 600 entreprises, était estimé à plus de 1,84 milliard d’euros, avec une valeur ajoutée évaluée à plus de 730 millions d’euros et 18.000 emplois équivalents temps plein (ETP) dont plus de 10.000 directs.
Ces emplois se répartissent dans l’ensemble des régions. Globalement, les Hauts-de-France, l’Ile-de-France, l’Occitanie et les Pays de la Loire prédominent. Pour les turbiniers et les fabricants de composants, les emplois ne suivent pas forcément les zones d’implantation des parcs et se concentrent dans les bassins industriels historiques - Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Hauts-de-France, Ile-de-France et Pays de la Loire (en particulier pour l’éolien en mer). Les emplois de services se trouvent principalement dans les Hauts-de-France, en Ile-de-France, dans les Pays de la Loire et en Occitanie tandis que les développeurs et développeurs-exploitants se concentrent en Ile-de-France, Pays de la Loire et Occitanie. Les bureaux d’études sont quant à eux localisés pour l’essentiel à proximité des principaux lieux d’implantation des parcs – Hauts-de-France, Normandie, Pays de la Loire et Occitanie.
L’étude rappelle les grandes étapes de la politique de soutien depuis 2000 : obligation d’achat puis introduction de tarifs dédiés, lancement d’une série d’appels d’offres, fixation d’objectifs de déploiement 2000-2015. Mais malgré des résultats encourageants, la filière éolienne n’a pas atteint les objectifs de déploiement initialement définis dans les programmations pluriannuelles des investissements (PPI) successives. "Il apparaît a posteriori que sur la période qui s’étend jusqu’à 2012, la fixation des objectifs et l’élaboration du cadre réglementaire n’ont pas suffisamment anticipé les difficultés qui allaient se présenter en termes de conflits d’usages, d’intégration locale, de prise en compte des impacts environnementaux et d’aménagement du réseau, relève l’Ademe. La prise en compte de ces enjeux a conduit à une accumulation de changements réglementaires dont on n’a pu réaliser que tardivement l’inadéquation avec des objectifs de déploiement ambitieux." Des efforts de simplification ont ensuite été entrepris et se poursuivent aujourd’hui, note toutefois l’Agence.
Faute de favoriser la naissance d’un "turbinier national" à même de jouer un rôle de chef de file, la politique de soutien a en tout cas eu le mérite de permettre l’émergence d’une filière française de l’éolien. Elle a aussi contribué significativement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, souligne l’étude. Entre 2002 et 2015, l’éolien a permis d’éviter l’émission de près de 63 millions de tonnes de CO2 équivalent et d’environ 250.000 tonnes de SO2, NOX et particules fines. "Ces bénéfices sanitaires et environnementaux, une fois monétarisés, représentent un gain estimé pour la collectivité de l’ordre de 3,1 à 8,8 milliards d’euros sur la période 2002-2013, ce qui dépasse largement le coût du dispositif de soutien à l’éolien (3,2 milliards d’euros)", constate l’Ademe.
A travers la mise en place d’une fiscalité spécifique (via l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux), l’apport d’outils de planification pour les collectivités locales (zones de développement et schémas régionaux de l’éolien) et la mise en œuvre, à partir de 2015, de mesures favorisant la participation des citoyens et des collectivités locales dans les projets éoliens, la politique publique a aussi contribué à redynamiser certains territoires ruraux, souligne l’étude.
"En fonction des caractéristiques d’un parc éolien et des taux de fiscalité votés localement, les retombées fiscales annuelles de l’implantation des parcs éoliens pour les collectivités locales se situent généralement entre 10.000 euros et 12.000 euros/MW installé, répartis entre la commune d’implantation, l’intercommunalité à fiscalité propre, le département et la région", indique-t-elle. "Ces recettes fiscales représentent une ressource non négligeable qui permet d’engager de nouveaux projets sociaux et environnementaux sur les territoires", poursuit-elle.
Par ailleurs, "des emplois de long terme sont créés sur les territoires d’implantation des parcs dans les activités d’exploitation et maintenance (13% des communes interrogées et 27% des communautés de communes déclarent que des entreprises locales interviennent dans la maintenance des parcs)", constate encore l’Ademe.
Les dernières évolutions du dispositif de soutien à l’éolien et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ouvrent des perspectives nouvelles. Pour atteindre les objectifs 2023 et 2030, le rythme annuel d’installations à terre doit confirmer et même dépasser celui de 2016 et le processus d’installation en mer se concrétiser et se stabiliser, souligne l’Agence. "Pour cela, il est primordial de faire du déploiement de l’éolien une opportunité de développement socio-économique aux niveaux national comme territorial", insiste-t-elle. En termes d’emplois, la filière pourrait en effet générer entre 60.000 et 93.000 ETP directs et indirects (hors exportations) à l’horizon 2050 et entre 40.000 et 75.000 en 2035.
L’Ademe estime que les acteurs de la filière devront relever à la fois des défis technologiques et logistiques pour aboutir simultanément à une hausse des facteurs de charge et à une baisse des coûts du MWh, en particulier dans l’éolien en mer, mais aussi collaborer plus étroitement avec les collectivités. "Ces perspectives de baisse de coût font de l’éolien l’une des filières de production d’électricité les plus compétitives en France", assure l’étude.
Malgré ces opportunités, 50% des projets éoliens ont fait l’objet de recours entre 2012 et 2014, entraînant des retards pouvant dépasser trois ans, indique-t-elle. "L’une des causes de ces recours réside dans une intégration inégale des projets au sein des territoires sur lesquels ils sont implantés, alors même que les récentes enquêtes ont montré une perception très positive de l’énergie éolienne par les Français", pointe l’Ademe. Selon elle, "l’implication croissante des parties prenantes et la co-construction de projets de grande qualité environnementale, sociale et économique" doivent être considérés comme "les leviers majeurs d’intégration locale des projets".
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