Le 22 juillet, Jean-Yves Grall, médecin et directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) du Nord-Pas-de-Calais, a remis à Marisol Touraine son rapport sur "La territorialisation des urgences". Il s'agissait en l'occurrence de dresser un bilan de la mise en œuvre des orientations du "Rapport sur la médicalisation des urgences", issu en 1993 des travaux d'une commission présidée par le professeur Adolphe Steg et qui reste le texte fondateur de l'organisation actuelle.
Plus de vingt ans après, ce nouveau rapport ne nie pas les progrès accomplis : médicalisation accrue et réglementation des activités d'urgence, mise en place de filières spécialisées, restructuration et rationalisation des locaux, développement de structures privées comme "SOS médecins", organisation de la permanence des soins ambulatoires (PDSA)...
Pourtant, malgré ces améliorations indéniables, le rapport constate que "le 'grand déséquilibre' s'accentue". L'expression vise différentes évolutions. La première concerne l'affluence croissante aux urgences (18 millions de passages en 2013, soit un Français sur 3,5 contre un sur huit en 1990) pour une majorité de demandes de soins non urgents. Dans le même temps, la PDSA "s'affaisse", avec une érosion continue du volontariat depuis 2002 et un système qui s'essouffle (voir nos articles ci-contre du 9 juin et du 3 juillet 2015). Cette double évolution a pour conséquence "des tensions hospitalières récurrentes et régulières", avec déclenchement du plan blanc ou du dispositif d'hôpital en tension. En d'autres termes, selon le rapport, le système est à la fois "victime de son succès" et d'un "grand malentendu" (sur la mission réelle des urgences).
Face à ce constat, le rapport propose d'"adapter la stratégie de prise en charge", en s'appuyant sur plusieurs fondamentaux comme l'adaptation de la prise en charge des soins à la demande exprimée par les patients, la garantie effective d'un accès aux soins - vraiment - urgents en un délai maximal de 30 minutes en tout point du territoire, une approche pragmatique de la notion de territoire, l'optimisation des ressources médicales...
Sur cette notion de territorialisation, le rapport estime que "le territoire adapté devrait être calqué sur le périmètre des GHT [groupements hospitaliers de territoire, ndlr], compte tenu du socle que représentent les structures d'urgences hospitalières", tout en se montrant pragmatique dans les grandes agglomérations où cette échelle pourrait se révéler moins pertinente.
De ces orientations, le rapport tire un ensemble de propositions très concrètes. Parmi celles-ci, on retiendra notamment le déploiement d'un "réseau territorial de l'accès aux soins non programmés" avec, sur chaque territoire, des "filières explicites de prise en charge graduée" regroupant, sous l'égide de l'ARS, l'ensemble des acteurs concernés et des structures prévues par le projet de loi Santé (GHT, communautés professionnelles territoriales de santé...). De même, le rapport préconise la mise en place d'une "équipe d'urgentistes de territoire", portée par l'établissement pivot du GHT et agissant comme "prestataire de service" pour toutes les structures d'urgence du territoire.
Sur l'amélioration de la prise en charge des patients ne relevant pas de "l'urgence vraie", le rapport propose notamment d'élargir les plages d'ouverture des maisons médicales de garde (avec en particulier une ouverture diurne les jours ouvrables) et d'organiser, au sein du réseau de territoire, une filière de prise en charge de la "petite traumatologie" (qui représente près de 40% des passages aux urgences).
A la réception du rapport, Marisol Touraine a indiqué qu'"un groupe de travail sera mis en place, afin de préciser les modalités de mise en oeuvre des recommandations retenues en cohérence avec les évolutions de l'organisation territoriale portées par le projet de loi de modernisation de notre système de santé".
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