À la mi-septembre, Emmanuelle Wargon, la ministre déléguée en charge du logement, laissait entendre que le gouvernement avait l'intention de prolonger le PTZ (prêt à taux zéro, pour les primo-accédants à la propriété) et le dispositif Pinel (déduction fiscale pour investissement locatif). La nouvelle avait alors soulagé les acteurs de la construction, secoués par le premier confinement (voir notre article du 15 septembre 2020). Dans le même temps, le gouvernement ne fermait pas la porte à une réforme de ces deux dispositifs, et notamment du Pinel, régulièrement critiqué. Un possible "verdissement" était notamment évoqué, afin de lutter contre l'artificialisation des sols.
À l'occasion de l'examen à l'Assemblée nationale de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2021, le gouvernement a déposé deux amendements sur ces dispositifs. L'un d'entre eux prolonge effectivement le PTZ. Mais, côté réforme, les modifications apportées au PTZ et au Pinel se réduisent à deux mesures plutôt cosmétiques. Il est vrai que la nouvelle aggravation du contexte sanitaire et la crise économique qui en résulte n'incitent pas vraiment à remettre en cause des dispositifs qui, malgré certains effets pervers, contribuent au soutien de l'activité dans la construction.
Le premier amendement déposé par le gouvernement (n°II-3516, après l'article 45) concerne le PTZ, qui devait s'éteindre au 31 décembre 2021. Comme annoncé, il prolonge le dispositif – qualifié de "principal dispositif de soutien à l'accession à la propriété" et d'"outil de soutien indirect à la construction de logements" – jusqu'au 31 décembre 2022. Cette prolongation d'un an s'accompagne d'une mesure, relativement secondaire, issue du rapport remis par l'Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), il y a un an (voir notre article du 7 novembre 2019). La mesure consiste, "afin d'éviter les effets d'aubaine", à prendre en compte, les revenus du bénéficiaire de l'année de l'émission de l'offre de prêt plutôt que ceux de l'année N-2. On reconnaît dans cette disposition la logique de contemporanéisation, déjà annoncée pour les APL (aides personnelles au logement). La mesure retenue se situe toutefois assez loin de la lettre et de l'esprit du rapport de l'IGF et du CGEDD, qui proposait plutôt de supprimer le PTZ, non pas seulement dans les zones détendues (comme envisagé à l'époque), mais aussi dans les zones tendues.
Le second amendement (n°II-3514, après l'article 45) porte sur le Pinel. Contrairement à ce qui était envisagé, le dispositif n'est pas prolongé et devrait donc en principe s'éteindre à la date prévue, soit le 31 décembre 2021. S'appuyant sur un second rapport de l'IGF et du CGEDD, paru le même mois que celui sur le PTZ (voir notre article du 15 novembre 2019), l'exposé des motifs de l'amendement gouvernemental explique qu'"actuellement, la réduction d'impôt Pinel en faveur de l'investissement locatif intermédiaire en zone tendue ne remplit pas entièrement son objectif de développement d'une offre locative réellement intermédiaire faute notamment d'un bon calibrage des plafonds de loyers".
Il indique aussi qu'il arrive que les loyers fixés par le bénéficiaire du Pinel durant la période de mise en location de 3, 6 ou 9 ans "soient supérieurs au montant moyen des loyers de marché". La mesure introduite par l'amendement consiste donc à préciser que "les plafonds de loyer [...] ne doivent pas excéder le montant moyen des loyers constaté l'année précédente sur le marché locatif des logements". Là aussi, le rapport de l'IGF et du CGDD allait beaucoup plus loin dans la réforme du dispositif, tout en reconnaissant qu'il est difficile d'envisager une suppression du Pinel.
Ces deux amendements ont aussitôt fait réagir le secteur de la construction. Dans un communiqué commun du 10 novembre, la FFB (Fédération française du bâtiment) et la FPI (Fédération des promoteurs immobiliers) évoquent "des amendements gouvernementaux qui ne règlent rien et sèment la confusion". Les deux organisations relèvent tout d'abord que "l'engagement de prorogation en 2022 n'est respecté que pour le PTZ. Malgré des assurances répétées, le Pinel s'arrêterait toujours fin 2021".
FFB et FPI estiment aussi que "le gouvernement ne saisit pas l'opportunité de renforcer ces dispositifs". Elles plaidaient en effet pour un renforcement du PTZ pour les ménages jeunes et modestes, en particulier dans les zones B2 et C (les moins tendues en matière de logement), mais aussi pour un développement du Pinel, afin d'"encourager la mobilisation de l'épargne privée en faveur du logement neuf". Enfin, les deux organisations jugent que "le gouvernement fait le choix de la complexité", en particulier avec la contemporane?isation. Conclusion pro domo : "C'est un long hiver qui se profile pour le secteur de la construction. Le pire de la crise est-il un moment bien choisi pour affaiblir des dispositifs qui ont fait leur preuve ?"
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