Edouard Courtial, député (Les Républicains) de l'Oise et président du conseil départemental, et Eric Doligé, sénateur (Les Républicains) du Loiret, ont présenté leurs propositions de loi - identiques - visant "à améliorer l'accès aux droits et à lutter contre la fraude sociale". Le texte a été cosigné par 71 sénateurs et 56 députés.
Tout en reconnaissant que le dispositif de lutte contre la fraude sociale a fait des progrès ces dernières années - notamment avec la création de la délégation nationale de lutte contre la fraude (DNLF) en 2008 -, les signataires du texte estiment qu'"il paraît nécessaire de tirer les conséquences des difficultés rencontrées en matière de lutte contre la fraude afin d’améliorer les dispositifs actuellement en place".
La proposition de loi se fixe donc trois objectifs principaux : garantir un système de solidarité "généreux, efficace et dont les modalités de contrôle ne portent pas atteinte aux droits des bénéficiaires [...]" ; offrir aux pouvoirs publics nationaux et aux collectivités territoriales "les outils et les moyens nécessaires à un exercice plein et entier de leur vigilance contre les risques de fraude sociale" ; définir les moyens juridiques et notamment les sanctions judiciaires adaptées à la fraude sociale.
Les préoccupations relatives aux difficultés financières des départements ne sont naturellement pas absentes. Le texte procède à une distinction entre les bénéficiaires du RSA que des "pathologies difficilement surmontables" ou une situation de rupture prolongée éloignent durablement de l'emploi - et qui relèveraient de l'Etat, notamment au titre de la politique de santé - et les bénéficiaires réinsérables rapidement, qui continueraient de relever des départements.
Forte d'une vingtaine d'articles et s'appuyant sur un travail juridique manifestement approfondi, la proposition de loi penche nettement plus, malgré son intitulé, du côté de la lutte contre la fraude que de celui de l'amélioration de l'accès aux droits.
Elle propose notamment de n'ouvrir le droit au RSA qu'à partir du moment où le dossier de demande est réellement complet, afin d'éviter certains abus. Elle rend également plus systématiques les suspensions de versement en cas de non-respect de ses engagements par le bénéficiaire, le passage en équipe pluridisciplinaire n'intervenant alors qu'après la suspension (et non plus avant).
Parmi les motifs de suspension du RSA par le président du conseil départemental, le texte ajoute aussi le cas où "le bénéficiaire ne respecte pas les principes et valeurs essentielles de la République, énoncés dans la charte des droits et devoirs du citoyen français", allusion évidente aux phénomènes de radicalisation.
Le texte prévoit aussi la mise en place d'une activité au service de l'intérêt général en contrepartie du bénéfice du RSA. Il précise que ces activités "adaptées aux besoins des territoires" et définies par les départements, "ne concerneraient pas les activités du secteur marchand".
Plusieurs articles sont exclusivement consacrés au renforcement de la lutte contre la fraude. L'un d'eux donne ainsi au département et au Codaf (comité opérationnel départemental anti-fraude) un accès de droit au RNCPS (répertoire national commun de la protection sociale). Le département serait également membre de droit du Codaf. Par ailleurs - et toujours dans une logique de contrôle et de croisement des informations - les membres du Codaf auraient également accès aux données détenues par les "entreprises délivrant l'eau, l'électricité, le gaz et fournissant l'accès au réseau des télécommunications".
D'autres articles du même titre renforcent et accélèrent les échanges d'informations. De même, ils créent un dispositif de flagrance sociale, sur le modèle de la flagrance fiscale (possibilité d'établir un procès-verbal avec mesures conservatoires). Dans le même esprit, la carte Vitale d'assurance maladie serait remplacée par une carte biométrique.
La proposition de loi se penche aussi sur les relations avec les Caf autour du RSA. Elle renforce très nettement le droit d'accès des départements aux informations détenues par les Caf et donne même la possibilité au conseil départemental de créer une "cellule de contrôle du RSA", dont les contrôleurs - agréés et assermentés - auraient des pouvoirs étendus pour "procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives" sur l'attribution du RSA et pour dresser des procès-verbaux "faisant foi jusqu'à preuve du contraire".
Un autre article simplifie la mise en œuvre du contrôle du train de vie des bénéficiaires et renforce les contrôles sur la détention par les demandeurs ou allocataires du RSA d'un éventuel patrimoine immobilier ou de produits financiers, y compris lorsque ceux-ci se trouvent à l'étranger.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : proposition de loi visant à améliorer l'accès aux droits et à lutter contre la fraude sociale.
ncG1vNJzZmivp6x7o63NqqyenJWowaa%2B0aKrqKGimsBvstForKedXaW%2FsLzOrKCtoZ%2BjeqWxjKWmomWclsC0scybo56dXZrBbq3UZqqeppGperG71Ktkq52em7yzr8SrZKWdo2KwsLrTq6alnaNiwLa%2BjKWcZqqjlg%3D%3D